Black Friday : quand les Français critiquent la surconsommation… des autres

Ce vendredi marque le lancement du Black Friday, cette grand-messe de la consommation importée des États-Unis. L’occasion de s’interroger sur le rapport complexe et parfois paradoxal que les Français entretiennent avec la consommation, à la lumière des résultats de la vague 2 du Baromètre Sobriétés et Modes de vie réalisé par l’ADEME et L’ObSoCo en 2025.

Une critique affichée des logiques consuméristes
Les Français affichent une opinion globalement critique vis-à-vis des logiques consuméristes et plus généralement vis-à-vis de la place de la consommation dans nos modes de vie. 77% d’entre eux considèrent ainsi qu’aujourd’hui, en France, « on a tendance à accorder trop d’importance à la consommation matérielle« . Une proportion similaire (76%) estime que les gens passent « trop de temps à consommer plutôt qu’à profiter des plaisirs simples de la vie ». Plus encore, 83% jugent qu’en France, « les gens consomment trop ».

Cette posture critique s’étend aux leviers de la consommation : publicité et opérations promotionnelles sont accusées par 77% des Français d’inciter à la surconsommation. La publicité fait l’objet d’un rejet particulièrement marqué, tandis que les promotions bénéficient d’un regard plus ambivalent – 52% des Français les considérant comme « nécessaires pour que tout le monde puisse consommer ». 

Mais une relative remise en question individuelle
De fait, il semble difficile de résister aux sirènes de la consommation. Ainsi, bien que plus de 8 Français sur 10 pointent du doigt la surconsommation à l’échelle collective, ils ne sont plus « que » 32% à admettre personnellement consommer trop (dont seulement 5% « tout à fait »). Interrogés sur leurs pratiques concrètes, ils sont une écrasante majorité à considérer que leur consommation est « simplement adaptée à leurs besoins ».

Seulement 19% estiment qu’ils « pourraient acheter moins de vêtements », et à peine 6% jugent qu’ils renouvellent leur smartphone « trop souvent ». Le problème de surconsommation est reconnu à l’échelle globale, mais rares sont ceux qui s’y reconnaissent personnellement. Cette dissonance s’explique en partie par l’attachement persistant au pouvoir d’achat, surinvesti politiquement et médiatiquement. Bien que les dimensions sociales et environnementales arrivent en tête des critères du « bien vivre », le pouvoir d’achat constitue le principal motif d’insatisfaction : 47% des Français jugent leur pouvoir d’achat « trop faible pour avoir une qualité de vie satisfaisante ».

Des intentions de modération… guidées par l’économie
Pour l’avenir, une part non négligeable des Français anticipent une modération de leurs pratiques : 21% envisagent de limiter leurs achats de vêtements, 12% de conserver plus longtemps leur smartphone. Mais ces intentions relèvent avant tout de la contrainte économique. Les enjeux environnementaux, bien que présents, arrivent systématiquement en second plan. Des lors, un desserrement de la contrainte budgétaire pourrait-il remettre en cause l’engagement dans des pratiques plus sobres ? Pas forcément, car d’autres signaux de mise à distance du consumérisme sont bien là : 82% des Français tentent de limiter leur consommation de produits non nécessaires, 77% privilégient la qualité à la quantité, et 92% cherchent à conserver leurs produits le plus longtemps possible. 

Des signaux que confirme le baromètre trimestriel de L’ObSoCo : l’envie de consommer est au plus bas depuis le début depuis 4 ans. Alors qu’en 2021, près d’un quart des Français manifestaient une « forte envie de consommer », ils sont désormais moins d’un sur trois. Une baisse de l’appétence à la consommation qui n’est pas seulement liée aux préoccupations à l’égard du pouvoir d’achat (le taux d’épargne reste élevé) mais qui témoigne aussi d’une transformation de la place de la consommation dans nos mode de vie.

Le Black Friday fonctionnerait donc comme un « pic » d’intensité consumériste dans une tendance plus générale à l’érosion du désir de consommation.

Source : Baromètre « Sobriété et modes de vie », Vague 2, ADEME – L’ObSoCo, 2025

A lire :

– Le communiqué de presse de l’ADEME (26/11/2025)

 La vague 2 du Baromètre Sobriétés et modes de vie »