Cette grille d’analyse fait émerger six profils distincts, véritables révélateurs de nos clivages sociétaux face à l’alimentation.
Les « conventionnels » (19%) : forte confiance, faible transition
Plutôt âgés et sereins, ils incarnent la confiance dans le modèle agroalimentaire industriel. Grandes marques et grande distribution leur apportent des garanties réelles. Sans restrictions budgétaires ni inquiétudes sanitaires particulières, ils n’éprouvent pas le besoin de changer leurs habitudes alimentaires traditionnelles.
Les « vigilants » (12%) : forte confiance ET forte transition
Jeunes, urbains, connectés, ils réconcilient confiance institutionnelle et engagement alimentaire. Utilisateurs d’applications anti-gaspillage, adeptes de la livraison et des circuits bio, ils naviguent avec aisance entre innovation et tradition. Une nouvelle génération qui croit possible l’amélioration du système de l’intérieur.
Les « épicuriens » (19%) : transition patrimoniale, confiance sélective
Hommes, âgés, aisés, ils s’engagent dans une forme de transition alimentaire, mais tournée vers la valorisation du patrimoine gastronomique français. Leur défiance envers l’industrie agroalimentaire les pousse vers les circuits traditionnels (artisans, producteurs locaux) plutôt que vers des alternatives écologiques.
Les « contestataires » (10%) : forte transition, défiance radicale
À dominante féminine et éduquée, ce groupe mène une véritable révolution alimentaire par défiance envers le modèle dominant. Très critiques envers l’élevage industriel et les grandes marques, ils privilégient bio, circuits courts et alternatives végétales. Leur engagement éthique transforme chaque achat en acte politique.
Les « contraints » (30%) : déconsommation subie
Le groupe le plus important, caractérisé par une forme de « déconsommation » alimentaire imposée par les contraintes financières. Malgré leurs inquiétudes sanitaires et environnementales, ils ne peuvent accéder à la transition alimentaire, créant un sentiment d’exclusion et de défiance par dépit.
Les « désengagés » (10%) : déconsommation choisie
Hommes seuls en situation de précarité, ils manifestent un désintérêt volontaire pour les enjeux alimentaires. Ni transition ni confiance : l’alimentation est réduite à sa fonction basique, par indifférence plus que par contrainte.
Cette cartographie révèle une France alimentaire à plusieurs vitesses, où la capacité à s’engager dans la transition alimentaire dépend largement des moyens économiques et culturels. Elle montre aussi que la défiance envers le système peut conduire soit à un engagement alternatif (contestataires), soit à un retour aux valeurs patrimoniales (épicuriens), soit à un décrochage (contraints et désengagés).
Plus qu’une simple segmentation, cette typologie interroge l’avenir de notre modèle alimentaire : comment réduire les écarts entre ceux qui choisissent leur transition et ceux qui la subissent ou s’en excluent ? Comment reconstruire une confiance partagée dans notre système alimentaire ?
Découvrez dans quel profil vous vous reconnaissez et ce que cela révèle des tensions de notre société face aux défis alimentaires !
A lire :
La France à table, 2ème édition. Tensions et mutations autour de notre rapport à l’alimentation, par Guénaëlle Gault et Agnès Crozet
Source :
LObSoCo, L’Observatoire du rapport à la qualité et aux éthiques alimentaires, vague 4, 2024.